INTERNATIONAL COMMISSION OF JURISTS Commission internationale de juristes - Comisión Internacional de Juristas
" dedicated since 1952 to the primacy, coherence and implementation of international law and principles that advance human rights "
Réunion complémentaire à la deuxième session extraordinaire de la
Commission arabe permanente des droits de l’homme consacrée à
l’actualisation de la Charte arabe des droits de l’homme (4 au 15 janvier 2004) Adoption du texte de la Charte arabe des droits de l’homme Commentaires de la Commission internationale de juristes Février 2004 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, 1219 Châtelaine, Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 1 / 17
Table des matières
I. Introduction : ................................................................................................................................................. 3 II. Des améliorations significatives................................................................................................................... 4 1) La mise à niveau des dispositions de la Charte arabe des droits de l’homme.................................. 4 2) Les innovations de la Charte arabe des droits de l’homme ................................................................ 7 III. Des préoccupations subsistantes ............................................................................................................ 7 1) Les fondements et le préambule de la Charte arabe des droits de l’homme.................................... 7 2) L’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.................................................................... 8 3) L’affirmation incertaine du principe de non-discrimination............................................................... 8 a. Le maintien de la discrimination à l’égard des femmes................................................................... 8 b. Le maintien de la discrimination à l’égard des non-ressortissants................................................. 8 4) Le possible maintien de la peine de mort pour les mineurs.............................................................. 10 5) La non prohibition des peines cruelles, inhumaines, humiliantes ou dégradantes........................ 12 6) La protection insuffisante des minorités ............................................................................................. 13 7) La remise en cause du droit d’asile ....................................................................................................... 14 8) Une certaine insécurité juridique liée aux procédures d’amendement de la Charte ...................... 15 IV. Conclusion : ............................................................................................................................................. 15 V. Liste des recommandations :...................................................................................................................... 16
L’initiative d’actualiser le texte de la Charte arabe des droits de l’homme a été entérinée par la décision 6302/119 (Part II) du 24 mars 2003 du Conseil de la Ligue des Etats arabes. La révision et l’actualisation du texte de la Charte à la lumière des standards internationaux en matière de protection des droits de l’homme1 avait en effet été jugée nécessaire pour en accroître le très faible succès et répondre aux différentes critiques, formulées tant par certains Etats arabes que par différentes organisations non gouvernementales, arabes ou internationales et à l’absence de ratifications.2 Aux termes de deux sessions extraordinaires de la Commission arabe permanente des droits de l’homme aux mois de juin et d’octobre 2003 entièrement consacrées à la « modernisation » de la Charte arabe des droits de l’homme et au cours desquelles les propositions des Etats membres de la Ligue ont été discutées, un texte final a été adopté lors de la réunion complémentaire à sa deuxième session extraordinaire qui s’est tenue du 4 au 15 janvier 2004. La Commission internationale de juristes (CIJ) avait adressé ses observations sur le texte révisé à l’issue des réunions de juin et octobre et exprimé ses vives préoccupations suite aux modifications suggérées qui, loin de ramener la Charte arabe des droits de l’homme au niveau des standards internationaux en matière de droit de l’homme, constituaient de véritables régressions en matière de promotion et de protection des droits de l’homme. 3 Dans le cadre d’un accord d’assistance technique,4 le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et la Ligue des Etats arabes ont constitué un groupe d’experts arabes issus des organes de surveillance de l’application des traités des Nations Unies et des procédures spéciales de la Commission des droits de l’homme chargé d’examiner le texte de la Charte arabe des droits de l’homme dans ses versions de 1994 et 2003 et d’évaluer sa conformité aux normes internationales en matière de protection des droits de l’homme. 5 A l’issue d’une réunion qui s’est tenue au Caire du 21 au 26 décembre 2003, le groupe d’experts arabe a formulé un certain nombre de recommandations et a proposé un nouveau texte de Charte arabe des droits de l’homme. La CIJ salue cette initiative et l’assistance technique fournie par le Haut Commissariat aux droits de l’homme ainsi que le travail accompli par les experts arabes. Un projet de Charte arabe des droits de l’homme a été soumis par le « groupe d’experts arabes membres d’organes des Nations Unies pour Voir la réponse de la Ligue des Etats arabes du 30 juillet 2003 à un communiqué de presse de la Commission internationale 1 de juristes du 20 juin 2003 « Arab Charter on Human Rights Must Meet International Standards » à l’occasion de la session de la Commission arabe permanente des droits de l’homme de juin 2003 : « The objective of the Meeting [of the Permanent Arab Committee on Human Rights] was to review the Arab Charter and amend and modify it as necessary, in order to ensure its consistency with the evolving standards and practices pertaining to the protection of human rights ». (La CIJ souligne). Voir également la définition de la notion de « modernisation de la Charte » par le Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes comme étant l’entreprise de mise en conformité de la Charte arabe des droits de l’homme avec les standards internationaux en matière de droits de l’homme et la suppression de toute incohérence, in : Report of the Arab Standing Commitee on Human Rights at its special session, Cairo, October 2003. 2 Voir les déclarations de Sanaa’ de décembre 2002 et de Beyrouth de juin 2003 à l’initiative respectivement du Centre arabe pour l’éducation au droit international humanitaire et aux droits de l’homme et du Cairo Institute for the Studies of Human rights. 3 Commission internationale de juristes, Le processus de « modernisation » de la Charte arabe des droits de l’homme : des régressions inquiétantes, Rapport de position, 20 décembre 2003, disponible à l’adresse : http://www.icj.org/news.php3?id_article=3212〈=fr 4 Un « Memorandum of intent » a été signé en avril 2002 entre la Ligue des Etats arabes et le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme dans le cadre de l’assistance technique et des services consultatifs. 5 Voir les termes de référence de la mission du Comité d’experts qui s’est réunie au Caire du 21 au 26 décembre 2003. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 3 / 17 réviser le projet de modernisation de la Charte arabe des droits de l’homme ». 6 Si la majorité de ces recommandations a été incluse dans le texte final de Charte arabe des droits de l’homme, il faut cependant regretter qu’il n’ait pas été adopté dans son intégralité et que certaines propositions, notamment sur le rôle des ONG dans la procédure devant le Comité arabe des droits de l’homme, n’aient pas été retenues. Cette note entend analyser brièvement le texte de la Charte arabe des droits de l’homme telle qu’adoptée en janvier 2004. Pour une analyse des versions précédentes, nous renvoyons au rapport de position de la Commission internationale de juristes sur le processus de « modernisation » de la Charte arabe des droits de l’homme : des régressions inquiétantes, de décembre 2003. II. Des améliorations significatives La CIJ note avec satisfaction que le texte adopté par la Commission arabe permanente des droits de l’homme en janvier 2004 présente des améliorations notables par rapport au texte de 1994 et au texte adopté en octobre 2003. Améliorations notables qu’il faut souligner. Il présente par ailleurs des aspects innovants qui méritent également d’être soulignés. 1) La mise à niveau des dispositions de la Charte arabe des droits de l’homme Il faut ainsi noter une mise à niveau significative de la quasi-totalité des droits mentionnés. La Charte arabe des droits de l’homme dans sa version actualisée de 2004 assure, pour un grand nombre de droits, un niveau de protection similaire à celui des traités universels et régionaux en matière de protection des droits de l’homme. Il faut d’ores et déjà remarquer qu’en matière d’administration de la justice, des progrès considérables ont été accomplis. Ainsi, par exemple : Dans l’article 1 de la Charte, la référence à l’universalité, l’interdépendance et le caractère • indissociable des droits de l’homme est à relever. La nouvelle version de la Charte arabe consacre le principe de non discrimination, la parité des • chances et l’égalité effective entre l’homme et la femme dans l’exercice de tous les droits énoncés dans la Charte (article 3), le droit à la vie (article 5), limite la peine de mort aux crimes les plus graves (article 6) et l’interdit pour les femmes enceintes ou les mères qui allaitent (article 7), interdit la torture ou les traitements cruels, inhumains, humiliants ou dégradants, qualifie de tels actes de crimes imprescriptibles et garantit le droit à la réparation des victimes (article , interdit les expériences médicales sans le consentement des personnes (article 9). La Charte arabe dans sa toute dernière version remédie enfin à une omission flagrante en interdisant l’esclavage, la servitude et la traite des êtres humains ou l’exploitation des enfants dans les conflits armés (article 10). Certains de ces droits ne sont cependant consacrés que de façon partielle et la CIJ recommande des précisions et compléments quant au contenu des droits garantis infra. En matière d’administration de la justice, une amélioration significative a eu lieu (voir articles 11 • à 20). Sont dorénavant garantis l’égalité devant la loi et l’égale protection de la loi (article 11), l’égalité devant la justice et l’indépendance de la justice (article 12), le droit à un procès équitable par un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi ainsi que l’aide juridictionnelle (article 13), le droit à la liberté et à la sécurité et aux garanties d’habeas corpus Report of the Arab Group of Experts who are members of the United Nations human rights bodies to reviw the draft 6 modernization of the Arab Charter on Human Rights, « Draft Modernization of the Arab Charter on Human Rights », December 2003. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 4 / 17 (article 14), le principe de la légalité des délits et des peines (article 15), la présomption d’innocence, le droit d’être informé immédiatement de façon détaillée de la nature des accusations portées, le droit de disposer d’un temps et de facilités suffisants pour préparer sa défense, le droit de prendre contact avec ses proches, le droit pour tout accusé à l’assistance d’un avocat de son choix, et le cas échéant, à l’assistance gratuite d’un interprète et le droit pour toute personne déclarée coupable de faire appel devant une instance judiciaire supérieure (article 16), un régime judiciaire spécial pour les mineurs (article 17), le principe non bis in idem (article 19), l’interdiction de l’emprisonnement pour dette civile (article 18) et enfin le traitement avec humanité des personnes privées de liberté (article 20). S’agissant de la bonne administration de la justice, trois remarques doivent être faites. S’agissant du droit à la liberté et à la sécurité des personnes, selon l’article 14 e) de la Charte arabe des droits de l’homme, toute personne arrêtée ou détenue du chef d’une inculpation pénale doit être présentée dans les plus brefs délais à un juge ou un fonctionnaire habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires. La formulation de l’article 14 est ainsi similaire à celle de l’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La CIJ attire dès lors l’attention sur l’interprétation de cette disposition par le Comité des droits de l’homme. En effet, à la lumière de la jurisprudence, seul un juge ou un fonctionnaire habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires présentant « l'objectivité et l'impartialité institutionnelles nécessaires » peut examiner la légalité de l’arrestation ou de la détention d’une personne.7 La seconde remarque a trait à la présomption d’innocence telle que consacrée à l’article 16 de la Charte. La présomption d’innocence est garantie tant par les instruments de droits de l’homme qu’en droit international humanitaire. Ainsi, tant l’article 75 du Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes de conflits armés internationaux (Protocole I) relatif aux garantis fondamentales que l’article 6 du Protocole additionnel aux Convention de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II) relatif aux poursuites pénales garantissent la présomption d’innocence. A la lumière de la jurisprudence du Comité des droits de l’homme et de son observation générale n° 29, la présomption d’innocence devrait être traitée dans la Charte comme un droit indérogeable. Enfin, la CIJ invite les auteurs de la Charte arabe à incorporer une disposition équivalente à l’article 15 de la Convention contre la torture selon lequel « toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne peut être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture pour établir qu’une déclaration a été faite ». L’article 23 constitue également une amélioration remarquable dans la mesure où sont • dorénavant garantis les recours utiles à toute personne dont les droits ou les libertés reconnus dans la Charte auraient été violés. Le droit à la vie privée et familiale est protégé de toute immixtion arbitraire ou illégale (article • 21). Voir par exemple Communication No 521/1992 : Vladimir Kulomin c. Hongrie, CCPR/C/56/D/521/1992, 01/08/96, 7 paragraphe 11.3 : « [...] Il considère qu'un élément inhérent au bon exercice du pouvoir judiciaire est qu'il doit être assuré par une autorité indépendante, objective et impartiale par rapport aux questions à traiter. En l'espèce, le Comité n'est pas convaincu que le procureur puisse être considéré comme ayant l'objectivité et l'impartialité institutionnelles nécessaires pour pouvoir être qualifié d’« autorité habilitée à exercer des fonctions judiciaires », au sens du paragraphe 3 de l'article 9 ». Voir également Comité des droits de l’homme, Communication No. 726/1996, Alexander Zheludkov c. Ukraine, CCPR/C/76/D/726/1996, 06/12/2002, paragraphe 8.3 « [...] L'État partie n'a pas fourni suffisamment d'informations indiquant que le procureur avait l'objectivité et l'impartialité institutionnelles nécessaires pour être considéré comme «une autorité habilitée à exercer des fonctions judiciaires» au sens du paragraphe 3 de l'article 9 du Pacte. [...] ». 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 5 / 17 Enfin, en matière de droits économiques, sociaux et culturels, la quasi-totalité des droits • consacrés dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a été garantie avec des innovations à relever telles que la garantie du droit à un environnement sain ou la référence à la lutte contre les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé de la personne. S’agissant des restrictions aux droits garantis8, les conditions de nécessité et de légalité des • restrictions ont été incorporées. D’autre part, la formulation « société respectueuse des libertés et droits de l’homme » a été incorporée. L’on pourra cependant regretter l’absence de référence à l’Etat de droit. La CIJ tient à souligner la contribution de la Charte arabe des droits de l’homme en matière de • droits indérogeables. L’article 4 de la Charte non seulement incorpore les conditions de formes requises mais intègre également dans la liste des droits indérogeables l’interprétation et la jurisprudence des organes de surveillance de l’application des traités des Nations Unies. La terminologie utilisée est aussi satisfaisante dans la mesure où il est fait référence à la seule suspension des droits garantis. Ainsi, l’article 4 de la Charte consacré aux dérogations exige la présence d’une situation d’urgence exceptionnelle mettant en danger l’existence de la nation, proclamée par un acte officiel. Les autres conditions de formes telles que la notification aux autres Etats parties au travers du Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes des droits auxquels il est dérogé et des motifs de la dérogation ainsi que la fin de la dérogation sont également énoncées. Seules les mesures non discriminatoires, compatibles avec les autres obligations incombant à un Etat partie en vertu du droit international peuvent être prises dans la stricte mesure où l’exige la situation. La CIJ note cependant qu’il existe des différences entre les motifs de la discrimination tels qu’énoncés dans l’article 3 alinéa a) et les motifs de discriminations tels qu’énoncés dans l’article 4 a). Ainsi, l’article 3 se réfère à la croyance religieuse alors que l’article 4 se réfère à la seule religion. Manque dans l’article 4 les référence à l’opinion, la pensée, l’origine nationale, la fortune, la naissance ou le handicap physique ou mental. Le rôle novateur des auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme est parfaitement illustré par la liste des droits indérogeables. Sont en effet considérés comme droits indérogeables le droit à la vie ; l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains, humiliants ou dégradants ; l’interdiction des expériences médicales ou scientifiques menées sans le libre consentement de la personne concernée ; l’interdiction de l’esclavage, de la servitude et de la traite des êtres humains ; le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial établi préalablement par la loi ainsi que le droit à l’aide juridictionnelle ; le droit à la liberté et à la sécurité ainsi que l’habeas corpus ; le principe de la légalité des délits et des peines ; l’interdiction de l’emprisonnement pour dette civile ; le principe non bis in idem ; la liberté de pensée, de croyance et de religion ; le traitement avec humanité des personnes privées de liberté ; la reconnaissance de la personnalité juridique de chacun ; le droit de quitter un pays, y compris son propre pays; le droit de demander l’asile ; le droit à la nationalité. La Commission internationale de juristes note avec une satisfaction que les garanties judiciaires nécessaires pour la protection des droits indérogeables sont également considérées comme indérogeables. Il s’agit là d’une avancée considérable qui entérine les évolutions intervenues dans la jurisprudence internationale sur les droits indérogeables. Voir article 24 relatif aux droits politiques, à la liberté d’association, de réunion et de rassemblement ; article 30 relatif à la 8 liberté de pensée, de croyance et de religion, article 32 relatif au droit à l’information , à la liberté d’opinion et d’expression et au droit de rechercher, recevoir et répandre des informations, article 35 relatif au droit de constituer des syndicats ou d’y adhérer. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 6 / 17 Manque cependant la présomption d’innocence qui est considérée comme une norme indérogeable par le Comité des droit de l’homme dans son Observation générale n° 29 consacrée aux dérogations en période d’état d’urgence. Aussi la CIJ invite-t-elle les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme à inclure la présomption d’innocence comme droit indérogeable. 2) Les innovations de la Charte arabe des droits de l’homme Les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme ont su faire preuve d’innovation et ont incorporé dans le texte finale de la Charte des éléments nouveaux. Ainsi : La Charte arabe des droits de l’homme rappelle dans son préambule le lien étroit existant entre • les droits de l’homme et la paix et la sécurité internationales et consacre ainsi la pratique du Conseil de sécurité. La Charte présente même des avancées qui pourront servir de modèles aux autres instruments • universels et régionaux, notamment en matière de handicapés, de violence contre les femmes et des obligations positives à la charge des Etats en matière de lutte contre la violence intra- familiale. Elle incorpore en outre des préoccupations nouvelles. Alors que la préoccupation à l’égard des • personnes handicapées est régulièrement réitérée par la Commission des droits de l’homme9, en matière de droits fondamentaux des personnes handicapées, la Charte arabe des droits de l’homme consacre l’interdiction de la discrimination sur la base du handicap physique ou mental ou encore le droit au travail sans distinction fondée sur le handicap. L’article 40 de la charte est exclusivement consacré aux obligations des Etats en faveur des personnes mentalement ou physiquement handicapées. Ainsi, l’Etat doit garantir aux personnes handicapées une vie décente et doit renforcer leur autonomie et leur participation effective dans la société ; l’Etat doit fournir des services sociaux gratuits, un soutien matériel si nécessaire, des services d’enseignement appropriés ou des services de santé appropriés. Les éléments essentiels de la Déclaration des droits des personnes handicapées10, de la résolution 37/52 du 3 décembre 1982 de l’Assemblée générale portant adoption du Programme d'action mondial concernant les personnes handicapées11, de la résolution 48/96 du 20 décembre 1993 de l’Assemblée générale portant adoption des Règles pour l'égalisation des chances des handicapés ou encore de la résolution 54/121 du 17 décembre 1999 de l’Assemble générale sont pris en compte. III. Des préoccupations subsistantes 1) Les fondements et le préambule de la Charte arabe des droits de l’homme S’il est vrai que les instruments universels tels que la Déclaration universelle des droits de l’homme ou le Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont réaffirmés et qu’il est simplement tenu compte de la Déclaration des droits de l’homme en Islam, le maintien dans le préambule ou dans l’article Résolutions de la Commission des droits de l’homme 2003/49 du 23 avril 2003 « Droits de l'homme des personnes 9 handicapées », résolution de la Commission des droits de l'homme 2002/61 du 25 avril 2002 « Droits fondamentaux des personnes handicapées », Résolution de la Commission des droits de l'homme 2000/51 du 25 avril 2000, « Droits fondamentaux des personnes handicapées ». 10 Déclaration proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1975 (résolution 3447 (XXX). 11 A/37/351/Add.1 et Corr.1, annexe, sect. VIII, recommandation I (IV). 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 7 / 17 2 de la Charte de références au sionisme et à la Déclaration des droits de l’homme en Islam demeurent problématiques. Dès lors, la CIJ réitère ses observations sur les interrogations soulevées par l’insertion de ces références et appelle à leur suppression. 2) L’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes L’article 2 de la Charte consacre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes dans toutes ses composantes, y compris la souveraineté permanente sur les ressources naturelles. L’article 2 d) qui énonce que « tous les peuples ont le droit de résister à l’occupation étrangère » dans sa formulation actuelle peut poser problème. La CIJ recommande dès lors de préciser que si tous les peuples ont le droit de résister à l’occupation étrangère, ils doivent le faire dans le respect du droit international, en conformité avec les principes du droit international, y compris les droits de l’homme et le droit humanitaire. 3) L’affirmation incertaine du principe de non-discrimination a. Le maintien de la discrimination à l’égard des femmes L’article 3, l’aliéna c) se réfère à la Charia islamique et précise que l’homme et la femme sont égaux sur le plan de la dignité humaine, des droits et des devoirs dans le cadre de la discrimination positive en faveur de la femme instituée par la charia islamique et les autres lois divines et par les législations et les instruments internationaux. La CIJ émet des réserves quant à la référence à la Charia islamique. Il s’agit là en effet d’une notion juridique susceptible d’interprétations variées et aux contours incertains qu’il faut utiliser avec précaution. La CIJ invite ainsi les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme à donner des illustrations de la discrimination positive instituée au profit de la femme par la Charia de façon à clarifier cette notion. Cependant, dans la mesure où l’on peut déduire de la formulation de cet alinéa que les règles issues de la Charia qui seraient discriminatoires à l’égard des femmes seraient écartées, cette référence ne porte pas atteinte au principe fondamental de non-discrimination tel que consacré par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme, les deux pactes des Nations Unies relatifs aux droits civils et politiques d’une part, et aux droits économiques, sociaux et culturels d’autre part ou encore la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Les articles 3 et 33 de la Charte arabe des droits de l’homme doivent par ailleurs être lus de façon concomitante. L’article 33 a) énonce que « la législation en vigueur réglemente les droits et les devoirs de l’homme et de la femme au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution ». Cette formulation est équivoque. La Commission internationale de juristes invite la Commission arabe des droits de l’homme à reprendre la formulation retenue par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques lequel consacre l’égalité de droits et de responsabilités des époux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. b. Le maintien de la discrimination à l’égard des non-ressortissants La Charte arabe des droits de l’homme présente une défaillance fondamentale dans la mesure où nombre de ses dispositions énoncent des droits au bénéfice des seuls ressortissants. Ainsi, Article 24 f) limite-t-il le bénéfice du droit à la liberté de réunion et à la liberté de rassemblement aux seuls citoyens. De même, l’article 34 de la Charte arabe énonce que le droit au travail est un droit naturel du citoyen et précise en son alinéa e) que « chaque Etat partie assure aux travailleurs qui immigrent 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 8 / 17 sur son territoire la protection requise conformément à la législation en vigueur ». Le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels reconnaît le droit au travail à toute personne. L’article 36 de la Charte arabe obéit à la même logique et réserve le droit à la sécurité sociale aux seuls citoyens, alors que l’article 9 du Pacte international relatif aux droit économiques, sociaux et culturels le garantit à toute personne. Enfin, l’article 41 qui garantit le droit à l’éducation limite la gratuité de l’enseignement au niveau primaire et fondamental aux seuls citoyens, contrairement à l’article 13, 2 a) et b) du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Or le « dispositif international des droits de l’homme repose sur le postulat selon lequel les personnes, en tant qu’êtres humains, doivent jouir de tous les droits reconnus à l’homme, mais que des distinctions exceptionnelles, par exemple entre ressortissants et non ressortissants, peuvent être faites à condition de servir l’objectif légitime d’un Etat et d’être proportionnées à la recherche de cet objectif ». 12 A cet égard, la Commission internationale de juristes souhaite attirer l’attention sur l’Observation générale n° 15 du Comité des droits de l’homme consacrée à la « Situation des étrangers au regard du Pacte » : « 1. [...] En général, les droits énoncés dans le Pacte s’appliquent à toute personne, sans considération de réciprocité, quelle que soit sa nationalité ou même si elle est apatride. 2. Ainsi, la règle générale est que chacun des droits énoncés dans le Pacte doit être garanti, sans discrimination entre les citoyens et les étrangers. Les étrangers bénéficient de l’obligation générale de non-discrimination à l’égard des droits garantis par le Pacte, ainsi que prévu à l’article 2. Cette garantie s’applique de la même manière aux étrangers et aux citoyens. Exceptionnellement, certains des droits reconnus dans le Pacte ne sont expressément applicables qu’aux citoyens (art. 25), tandis que l’article 13 ne vise que les étrangers. [...] 4. Le Pacte accorde aux étrangers une protection totale quant aux droits qu’il garantit, et les États parties devraient observer ses prescriptions dans leur législation et leur pratique. 7. [...] Les étrangers ont ainsi un droit inhérent à la vie qui est juridiquement protégé, et ne peuvent être privés arbitrairement de la vie. Ils ne doivent pas être soumis à la torture, ni à des traitements ou peines inhumains ou dégradants; ils ne peuvent pas non plus être réduits en esclavage ou en servitude. Les étrangers ont droit sans réserve à la liberté et à la sécurité de la personne. S’ils sont légalement privés de leur liberté, ils doivent être traités avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à leur personne. Un étranger ne peut être détenu pour inexécution d’une obligation contractuelle. Les étrangers ont droit à la liberté de mouvement et au libre choix de leur lieu de résidence; ils sont libres de quitter le pays. Ils jouissent de l’égalité devant les tribunaux, et ont droit à ce que leur cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi, et qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale et des contestations portant sur leurs droits et obligations de caractère civil. Les étrangers ne sont pas soumis à une législation pénale rétroactive, et ils ont droit à la reconnaissance de leur personnalité juridique. Ils ne peuvent être soumis à aucune immixtion arbitraire ou illégale dans leur vie privée, leur famille, leur résidence ni leur correspondance. Ils ont droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, et ont le droit d’avoir des opinions et de les exprimer. Les étrangers bénéficient du droit de réunion pacifique et de libre association. Ils peuvent se marier lorsqu’ils ont atteint l’âge légal du mariage. Leurs enfants bénéficient des mesures de protection nécessitées par leur état de mineur. Dans les cas où les étrangers constituent une minorité au sens de l’article 27, il ne peut leur être refusé le droit, en commun avec les autres membres de leur groupe, d’avoir leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion et d’employer leur propre langue. Les étrangers ont droit à une égale protection de la loi. Il n’y a pas de discrimination entre étrangers et citoyens dans l’application de ces droits. Ces droits des étrangers ne peuvent faire l’objet que Les droits des non-ressortissants, Rapport final du Rapporteur final, M. David Weissbrodt soumis en application de la 12 décision 2000/103 de la Sous-Commission, de la résolution 200/104 de la Commission et de la décision 2000/283 du Conseil économique et social, E/CN.4/Sub.2/2003/23, 26 mail 2003, paragraphe 6. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 9 / 17 des limitations qui peuvent être légalement imposées conformément au Pacte. » 13 La CIJ souhaite également souligner le paragraphe 34 de l’Observation générale n° 13 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels « Droit à l’éducation » : « 34. Le Comité prend note de l’article 2 de la Convention relative aux droits de l’enfant et de l’alinéa e de l’article 3 de la Convention de l’UNESCO concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement et confirme que le principe de non-discrimination s’étend à toutes les personnes d’âge scolaire qui résident sur le territoire d’un État partie, y compris les non-nationaux, indépendamment de leur statut juridique. » 14 Compte tenu de la prohibition expresse de la discrimination dans la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et dans la Convention relative aux droits des migrants, la Commission internationale de juristes prie instamment les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme d’éliminer du texte final toute persistance d’une forme quelconque de discrimination prohibée tant à l’égard des femmes qu’à l’égard des non ressortissants. 4) Le possible maintien de la peine de mort pour les mineurs S’agissant de la peine de mort prononcée contre des mineurs, la CIJ est profondément préoccupée par la formulation de l’article 7 de la Charte arabe des droits de l’homme. 15 Si l’article 7 semble interdire la peine de mort pour les mineurs, il contient une restriction importante dans la mesure où il laisse aux législations internes des Etats la possibilité d’en disposer autrement. Il s’agit là d’une restriction déguisée au droit garanti. La portée des droits garantis « peut devenir très réduite, voire nulle, si les modalités de son exercice sont abandonnées à la législation interne des Etats ayant reconnu ce droit ».16 En premier lieu, il importe de remarquer que doit être pris en compte l’âge au moment de la commission de l’infraction pénale.17 La CIJ attire l’attention de la Commission permanente arabe des droits de l’homme sur l’article 6 paragraphe 5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prohibe explicitement la sentence de mort pour des crimes commis par des personnes âgées de moins de 18 ans. Cette interdiction est réaffirmée par le Comité des droits de l’homme dans son Observation générale n° 17. 18 Par ailleurs, l’article 37 de la Convention sur les droits de l’enfant stipule que « ni la peine capitale ni l’emprisonnement à vie sans possibilité de libération ne doivent être prononcés pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans ». Il ressort de cet article que c’est l’âge de l’auteur de l’infraction pénale au moment de la commission de l’infraction pénale qui doit être pris en compte et que la peine de mort pour les mineurs est exclue sans exception aucune. Cette interdiction de la peine de mort pour des crimes commis par des personnes âgées de moins de 18 ans est indérogeable au regard de l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l’article 27 de la Convention américaine des droits de l’homme. Le Comité des droits de l’homme a ainsi considéré qu’ Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 15 : « Situation des étrangers au regard du Pacte », 11 avril 1986. 13 (La CIJ soulignons) 14 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale n° 13 : « le droit à l'éducation (art.13) », C/C.12/1999/10, 08 décembre 1999. 15 Article 7 énonce : « a) La peine de mort ne peut être prononcée contre les personnes âgées de moins de 18 ans sauf disposition contraire de la législation en vigueur au moment de l’infraction ». 16 Frédéric Sudre, Droit européen et international des droits de l’homme, 6e édition refondue, Presses universitaires de France, Paris, 2003, p. 203. 17 La CIJ souligne. 18 Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 17 : « Les droits de l'enfant (article 24) », 7 avril 1989, paragraphe 2. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 10 / 17 « un Etat ne peut se réserver le droit [...] d'exécuter des femmes enceintes ou des enfants » et qu’une telle réserve serait incompatible avec l’objet et le but du Pacte. 19 Les instruments régionaux en matière de protection des droits de l’homme contiennent une interdiction similaire. 20 Le droit international humanitaire consacre également l’interdiction de la peine de mort pour les mineurs. 21 Enfin, la Commission des droits de l’homme a systématiquement réitéré cette interdiction dans ses résolutions sur les droits de l’enfant ou sur la peine de mort. 22 Cette disposition de la Charte arabe est d’autant plus surprenante que les auteurs de la Charte se sont montrés soucieux d’assurer un régime favorable aux mineurs « compatible avec [leur] âge et qui protège [leur] dignité, facilite [leur] réadaptation et [leur] réinsertion » et que l’« intérêt supérieur [de l’enfant] soit, en toutes circonstances, le critère à la base de toutes les mesures le concernant qu’il s’agisse d’un enfant à risque ou d’un enfant délinquant. En effet, l’article 17 de la Charte dispose qu’ « un régime judiciaire spécial pour mineurs tout au long des poursuites, du procès et de l’application du jugement » doit être mis en place. D’autre part, l’article 33 c) de la Charte énonce l’obligation pour les Etats de prendre toutes les mesures législatives, administratives et judiciaires requises pour assurer la protection, la survie et le bien-être de l’enfant dans un climat de liberté et de dignité et de faire en sorte que son intérêt supérieur soit, en toutes circonstances, le critère à la base de toutes les mesures le concernant qu’il s’agisse d’un enfant à risque ou d’un enfant délinquant. Enfin, la quasi-totalité des Etats arabes sont partie à la Convention relative aux droits de l’enfant. Aussi la CIJ invite-t-elle la Commission arabe permanente des droits de l’homme a explicitement proscrire la peine de mort pour les personnes mineures au moment où elles ont enfreint la législation Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 24 : « Questions touchant les réserves formulées au moment de la 19 ratification du Pacte ou des protocoles facultatifs y relatifs ou de l'adhésion à ces instruments, ou en rapport avec des déclarations formulées au titre de l'article 41 du Pacte », 4 novembre 1994, paragraphe 8. Le Comité des droits de l’homme avait déjà exprimé une préoccupation similaire dans ses Observations finales sur les Etats Unis : « 279. Le Comité note avec regret l'étendue des réserves et des déclarations, entre autres des déclarations d'interprétation, faites par l'État partie à l'égard du Pacte. Il semble ressortir de tous ces énoncés que l'État partie a voulu masquer qu'il n'accepte que ce qui est déjà inscrit dans sa législation interne. Le Comité relève en particulier les réserves au paragraphe 5 de l'article 6 et à l'article 7 du Pacte, qui lui paraissent incompatibles avec les fins de cet instrument ». Comité des droits de l’homme, Observations finales, United States of America, CCPR/C/79/Add.50; A/50/40,paras.266-304, 3 octobre 1995. 20 Voir ainsi l’article 4, paragraphe 5 de la Convention américaine des droits de l’homme et l’article 5, paragraphe 3 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant. La Convention européenne des droits de l’homme interdit pour sa part la peine de mort, en toutes circonstances (voir le protocole n° 13). 21 Voir article 68 de la Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, article 77 du Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes de conflits armés internationaux (Protocole I) relatif à la protection des enfants et article 6 du Protocole additionnel aux Convention de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II). 22 Voir résolution 2002/92 du26 avril 2002 de la Commission des droits de l’homme selon laquelle les « a) Les gouvernements de tous les États, en particulier de ceux qui n'ont pas aboli la peine de mort, à respecter les obligations qu'ils ont contractées en vertu des dispositions pertinentes des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, à savoir notamment les articles 37 et 40 de la Convention relative aux droits de l'enfant et les articles 6 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ayant présentes à l'esprit les garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort, énoncées dans les résolutions 1984/50 et 1989/64 du Conseil économique et social, en date des 25 mai 1984 et 24 mai 1989, et engage ces États à abolir le plus tôt possible par une loi, la peine de mort pour les personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment où l'infraction a été commise ». Voir résolution de la Commission des droits de l'homme 2003/67 du 24 avril 2003, Question de la peine de mort, qui « prie instamment tous les États qui maintiennent la peine de mort: a) De ne pas la prononcer dans le cas de personnes âgées de moins de dix-huit ans et dans le cas de femmes enceintes. ». Voir également la résolution 2000/17 de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, en date du 17 août 2000, relative au droit international et à l'imposition de la peine de mort à des personnes âgées de moins de dix-huit ans au moment de la commission du délit. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 11 / 17 pénale d’un Etat partie. La CIJ réitère également que la peine de mort doit être exclue pour les personnes atteintes d'une quelconque forme de maladie mentale.23 5) La non prohibition des peines cruelles, inhumaines, humiliantes ou dégradantes Une autre omission de la Charte arabe des droits de l’homme concerne l’interdiction des peines cruelles, inhumaines, humiliantes ou dégradantes. En effet, l’article 8 de la Charte arabe des droits de l’homme se limite à interdire la torture physique et mentale et les traitements cruels, inhumains, humiliants ou dégradants. Le principe de l’interdiction de la torture, des peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradant est énoncé dans l’article 7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cette interdiction est précisée et explicitée par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les instruments régionaux de protection des droits de l’homme contiennent une interdiction similaire.24 L’Observation générale n° 7 du Comité des droits de l’homme énonce: « Comme il ressort des termes de cet article, le champ de la protection requise s’étend bien au-delà de ce que l’on entend normalement par torture. Il n’est peut-être pas nécessaire d’établir des distinctions très nettes entre les différentes formes de peines ou de traitements qui sont interdites : ces distinctions dépendent de la nature, du but et de la gravité du traitement utilisé. De l’avis du Comité, l’interdiction doit s’étendre aux peines corporelles, y compris les châtiments excessifs imposés à titre de mesures éducatives ou disciplinaires. Même une mesure telle que l’emprisonnement cellulaire peut, selon les circonstances, surtout lorsque la personne est détenue au secret, être contraire à l’article 7. En outre, il est évident que l’article protège non seulement les personnes arrêtées ou emprisonnées, mais également les élèves des établissements d’enseignement et les patients des institutions médicales. Par ailleurs, les pouvoirs publics ont également le devoir d’assurer une protection en vertu de la loi contre de tels traitements, même lorsqu’ils sont appliqués par des personnes agissant en dehors de leurs fonctions officielles ou sans aucune autorité officielle. En ce qui concerne toutes les personnes privées de liberté, l’interdiction des traitements contraires à l’article 7 est complétée par les dispositions positives du paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte qui stipule qu’elles doivent être traitées avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. »25 Cette observation générale a depuis été remplacée par l’Observation générale du Comité des droits de l’homme n° 20 lequel précise que : « 5. L’interdiction énoncée à l’article 7 concerne non seulement des actes qui provoquent chez la victime une douleur physique, mais aussi des actes qui infligent une souffrance mentale. En outre, de l’avis du Comité, l’interdiction doit s’étendre aux peines corporelles, y compris les châtiments excessifs infligés à titre de sanction pénale ou de mesure éducative ou disciplinaire. À cet égard, il convient de souligner que l’article 7 protège notamment les enfants, les élèves des établissements d’enseignement et les patients des institutions médicales. » . Cette interdiction a encore été réaffirmée par la Commission des droits de l’homme des Nations Unies dans sa résolution 23 2003/67 du 24 avril 2003, Question de la peine de mort, paragraphe 4 qui prie instamment tous les Etats qui maintiennent la peine de mort de ne pas prononcer la peine de mort dans le cas de personnes atteintes d'une quelconque forme de maladie mentale, ni d'exécuter un condamné atteint de maladie mentale. 24 Voir article 5 de la Convention américaine des droits de l’homme ; article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que la Convention européenne pour la prévention de la torture ; article 5 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. 25 Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 7: « La torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 7) », 30 mai 1982, paragraphe 2. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 12 / 17 Le Comité a poursuivi : 6. Le Comité note que l’emprisonnement cellulaire prolongé d’une personne détenue ou incarcérée peut être assimilé aux actes prohibés par l’article 7. Comme le Comité l’a noté dans son Observation générale no 6 (16), l’abolition de la peine capitale est évoquée d’une manière générale à l’article 6 du Pacte en des termes qui suggèrent sans ambiguïté que l’abolition est souhaitable. En outre, lorsque la peine de mort est appliquée par un État partie pour les crimes les plus graves, elle doit non seulement être strictement limitée conformément à l’article 6, mais aussi être exécutée de manière à causer le moins de souffrances possible, physiques ou mentales. Il ressort également de la jurisprudence du Comité des droits de l’homme que les châtiments corporels tombent clairement sous le coup de l’interdiction.26 Il reviendra à la Commission arabe permanente des droits de l’homme d’insérer une interdiction de la torture ou peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants. 6) La protection insuffisante des minorités La CIJ réitère son analyse développée dans son rapport de position de décembre 2003 s’agissant de la protection des minorités dans la Charte arabe des droits de l’homme. L’article 25 de la Charte se contente d’une affirmation hâtive des droits des minorités. La notion d’« exercice en commun avec les autres membres du groupe » n’est pas incorporée dans cet article. Enfin, assujettir l’exercice et la jouissance d’un droit à la réglementation interne d’un Etat revient à consacrer la possibilité pour l’Etat d’en entraver l’exercice. Voir Comité des droits de l’homme, Communication No. 792/1998, M. Malcolm Higginson c. Jamaica, 26 CCPR/C/74/D/792/1998, 29/04/2002, paragraphe 4.6 : « [...] L'auteur a affirmé que la flagellation au moyen d'une verge de tamarin constitue une peine cruelle, inhumaine et dégradante et que la condamnation à cette peine représentait une violation de l'article 7 du Pacte. [...] Indépendamment de la nature de l'infraction devant être réprimée et même si la législation nationale autorise les châtiments corporels, selon la jurisprudence constante du Comité, ce type de châtiment constitue une peine ou un traitement cruel, inhumain et dégradant contraire à l'article 7 du Pacte. Le Comité conclut que l'imposition ou l'exécution de la peine de flagellation au moyen d'une verge de tamarin constitue une violation des droits conférés à l'auteur par l'article 7. Voir également Communication No 569/1993 : Patterson Matthews c. Trinidad et Tobago, CCPR/C/62/D/569/1993, 29/05/98, paragraphe 7.2 : « En ce qui concerne le châtiment corporel auquel l'auteur a été condamné, le Comité note que M. Matthews n'a pas soulevé la question dans la communication qu'il lui a adressée. On peut en conclure que si la sentence a été effectivement prononcée, elle n'a peut-être pas encore été exécutée. Tout en réaffirmant que les châtiments corporels sont incompatibles avec l'article 7 du Pacte/Observation générale No 20, adoptée à la quarante- quatrième session, par. 5./, le Comité n'émet en l'espèce aucune constatation sur ce point. ». Voir Communication No. 265/1987 : Antti Vuolanne c. Finland, CCPR/C/35/D/265/1987, 02/05/89 : « 9.2 Le Comité rappelle que l'article 7 interdit la torture et les autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il constate que la détermination de ce qui constitue un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 7 dépend de toutes les circonstances, par exemple la durée et les modalités du traitement considéré, ses conséquences physiques et mentales ainsi que le sexe, l'âge et l'état de santé de la victime. Un examen approfondi de la communication n'a révélé aucun fait à l'appui des plaintes de l'auteur concernant la violation de ses droits en vertu de l'article 7. Jamais des peines ou souffrances graves, physiques ou mentales n'ont été infligées à M. Vuolanne par les pouvoirs publics ou à leur instigation; il ne semble pas non plus que la détention cellulaire qui a été imposée à l'auteur ait eu sur lui des effets physiques ou mentaux négatifs de par sa rigueur, sa durée et le but recherché. Il n'a pas été établi non plus que M. Vuolanne ait été humilié ou qu'il n'y ait eu atteinte à sa dignité, indépendamment du fait que la mesure disciplinaire qui lui a été imposée était embarrassante en soi. A cet égard, le Comité considère qu'une peine n'est dégradante que si l'humiliation ou l'abaissement qui en résulte dépasse un certain seuil et, en tout état de cause, si elle comporte des éléments qui dépassent le simple fait d'être privé de liberté. De plus, il considère que les faits qui lui ont été soumis ne permettent pas de dire que pendant sa détention, M. Vuolanne n'a pas été traité avec l'humanité et le respect de la dignité inhérente à la personne humaine exigés au paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte. ». (la CIJ souligne). Voir encore Observations finales du Comité des droits de l'homme : Yémen, CCPR/C/79/Add.51; A/50/40,paras.242-265, 03/10/95 : « 256. [...] Il est par ailleurs extrêmement troublé de constater que les châtiments corporels, par exemple les amputations et la flagellation, restent pratiqués, ce qui est contraire à l'article 7 du Pacte ». 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 13 / 17 7) La remise en cause du droit d’asile Il est vrai que l’article 28 de la Charte arabe des droits de l’homme reconnaît à chacun le droit de demander l’asile politique. Cependant poursuit l’article 28, « ce droit ne peut être exercé par une personne qui fait l’objet de poursuites pour une infraction de droit commun ». Cette disposition de la Charte est en contravention avec la Convention relative au statut de réfugié de 1951 et de son protocole additionnel de 1967. La Convention de 1951 exclut en effet du bénéfice du droit d’asile les « personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser : a) Qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes; b) Qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiés; c) Qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies. »27 De plus, ces clauses d’exclusion ont été interprétées par le Haut Commissariat aux réfugiés.28 Ainsi : « 2. The rationale for the exclusion clauses, which should be borne in mind when considering their application, is that certain acts are so grave as to render their perpetrators undeserving of international protection as refugees. Their primary purpose is to deprive those guilty of heinous acts, and serious common crimes, of international refugee protection and to ensure that such persons do not abuse the institution of asylum in order to avoid being held legally accountable for their acts. The exclusion clauses must be applied “scrupulously” to protect the integrity of the institution of asylum, as is recognised by UNHCR’s Executive Committee in Conclusion No. 82 (XLVIII), 1997. At the same time, given the possible serious consequences of exclusion, it is important to apply them with great caution and only after a full assessment of the individual circumstances of the case. The exclusion clauses should, therefore, always be interpreted in a restrictive manner. [...] B. Article 1F(b): Serious non-political crimes 14. This category does not cover minor crimes nor prohibitions on the legitimate exercise of human rights. In determining whether a particular offence is sufficiently serious, international rather than local standards are relevant. The following factors should be taken into account: the nature of the act, the actual harm inflicted, the form of procedure used to prosecute the crime, the nature of the penalty, and whether most jurisdictions would consider it a serious crime. Thus, for example, murder, rape and armed robbery would undoubtedly qualify as serious offences, whereas petty theft would obviously not. 15. A serious crime should be considered non-political when other motives (such as personal reasons or gain) are the predominant feature of the specific crime committed. Where no clear link exists between the crime and its alleged political objective or when the act in question is disproportionate to the alleged political objective, non-political motives are predominant.5 The motivation, context, methods and proportionality of a crime to its objectives are important factors in evaluating its political nature. The fact that a particular crime is designated as non-political in an extradition treaty is of significance, but not conclusive in itself. Egregious acts of violence, such as acts those commonly considered to be of a “terrorist” nature, will almost certainly fail the predominance test, being wholly disproportionate to any political objective. Furthermore, for a crime to be regarded as political in nature, the political objectives should be consistent with human rights principles. 16. Article 1F(b) also requires the crime to have been committed “outside the country of refuge prior to [the individual’s] admission to that country as a refugee”. Individuals who commit “serious non-political crimes” within the country of refuge are subject to that country’s criminal law process and, in the case of particularly grave crimes, to Articles 32 and Convention relative au statut des réfugiés, article premier F). 27 Background Note on the Application of the Exclusion Clauses: Article 1F of the 1951 Convention relating to the Status of 28 Refugees (4 September 2003) et Handbook on Procedures and Criteria for Determining Refugee Status under the 1951 Convention and the 1967 Protocol relating to the Status of Refugees, HCR/IP/4/Eng/REV.1 Reedited, Geneva, January 1992, UNHCR 1979, dont le chapitre IV est consacré aux clauses d’exclusion. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 14 / 17 33(2) of the 1951 Convention . » Par conséquent, la Commission internationale de juristes invite les membres de la Commission arabe permanente des droits de l’homme à reformuler l’article 28 de façon à ce qu’il soit conforme au droit international. 8) Une certaine insécurité juridique liée aux procédures d’amendement de la Charte L’article 50 de la Charte arabe des droits de l’homme énonce que « [t]out État partie peut, par l’intermédiaire du Secrétaire général, présenter par écrit des propositions pour modifier la présente Charte. Après notification de ces propositions aux autres États parties, le Secrétaire général invite ces derniers à les examiner en vue de leur approbation avant qu’elles ne soient présentées au Conseil de la Ligue pour adoption” et l’article 51 précise que “les modifications prennent effet à l’égard des États parties qui les ont approuvées une fois qu’elles ont été approuvées par les deux tiers des États parties à la Charte.” La procédure déterminée par la Charte arabe des droits de l’homme peut être source d’une certaine insécurité juridique. La Charte peut être ainsi dans un perpétuel processus de modification. La procédure retenue est également surprenante dans la mesure où le Conseil de la Ligue approuve les propositions d’amendement. Une question surgit immédiatement : est-ce tous les membres du Conseil de la Ligue ou les seuls membres qui sont parties à la Charte arabe des droits de l’homme ? Notons que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention relative aux droits des migrants prévoient la convocation d’une conférence des Etats parties pour la modification des traités. La réunion des Etats parties confère ainsi à la procédure un caractère solennel qui sied à la nature d’un instrument de droit de l’homme. La CIJ invite la Commission arabe permanente des droits de l’homme a adopter une procédure de modification de la Charte arabe des droits de l’homme identique à la procédure retenue dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention relative aux droits des migrants. IV. Conclusion La Commission internationale de juristes note avec satisfaction l’ensemble des améliorations apportées à la Charte arabe des droits de l’homme. Elle prie cependant instamment les auteurs de la Charte arabe de poursuivre leurs efforts et de parachever un processus de mise en conformité de la Charte arabe des droits de l’homme aux standards internationaux en matière de protection des droits de l’homme. Pour reprendre les termes du Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes lors de la réunion complémentaire à la deuxième session extraordinaire de la Commission arabe permanente des droits de l’homme consacrée à l’actualisation de la Charte arabe des droits de l’homme « force est donc pour les pays arabes d’aller de l’avant tout en préservant leurs principes et de montrer qu’ils font partie du monde et de sa civilisation tout en ayant leurs spécificités ». « Les membres de la Commission sont appelés à établir un projet de Charte arabe des droits de l’homme qui réponde aux aspirations et aux espoirs des peuples arabes, qui permette en même temps de réfuter les allégations non fondées dont fait l’objet la nation arabe et qui puisse trouver sa place parmi les principaux instruments internationaux en tant que gage du stade avancé atteint par la pensée arabe dans le domaine des droits de l’homme et de la 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 15 / 17 contribution de cette pensée à leur promotion ».29 V. Liste des recommandations : 1. La CIJ invite les auteurs de la Charte arabe à supprimer la condamnation du sionisme dans son préambule et dans son article 1er afin de consacrer la Charte à la seule protection des droits de l’homme dans la région arabe, sans digressions de nature politique susceptibles d’en obscurcir la finalité. 2. La CIJ recommande de préciser que si tous les peuples ont le droit de résister à l’occupation étrangère, ils doivent le faire dans le respect du droit international, en conformité avec les principes du droit international, y compris les droits de l’homme et le droit humanitaire. 3. Compte tenu de la prohibition expresse de la discrimination dans la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et dans la Convention relative aux droits des migrants, la Commission internationale de juristes prie instamment les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme d’éliminer du texte final toute persistance d’une forme quelconque de discrimination prohibée tant à l’égard des femmes qu’à l’égard des non ressortissants. 4. La CIJ invite la Commission arabe des droits de l’homme à reprendre la formulation retenue par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques lequel consacre l’égalité de droits et de responsabilités des époux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. 5. A la lumière de la jurisprudence du Comité des droits de l’homme et de son observation générale n° 29, la présomption d’innocence devrait être traitée dans la Charte comme un droit indérogeable. Aussi la CIJ invite-t-elle les auteurs de la Charte arabe des droits de l’homme à inclure la présomption d’innocence comme droit indérogeable dans son article 4. 6. La CIJ invite la Commission arabe permanente des droits de l’homme à explicitement proscrire la peine de mort pour les personnes mineures au moment où elles ont enfreint la législation pénale d’un Etat partie ou pour les personnes atteintes d’une quelconque forme de maladie mentale. 7. La CIJ invite les auteurs de la Charte arabe à incorporer une disposition équivalente à l’article 15 de la Convention contre la torture selon lequel « toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne peut être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture pour établir qu’une déclaration a été faite ». 8. Il reviendra à la Commission arabe permanente des droits de l’homme de compléter l’article 8 de la Charte arabe et d’insérer une interdiction des peines cruelles, inhumaines, humiliantes ou dégradantes. 9. Une meilleure protection des minorités conforme aux exigences de l’article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la Déclaration des droits des personnes In : Rapport et recommandations de la commission arabe permanente pour les droits de l’homme, Réunion 29 complémentaire à la deuxième session extraordinaire de la Commission consacrée à l’actualisation de la Charte arabe des droits de l’homme (4 au 15 janvier 2004). 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 16 / 17 appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques doit être assurée. 10. La CIJ invite les membres de la Commission arabe permanente des droits de l’homme à reformuler l’article 28 relatif au droit de demander l’asile de façon à ce qu’il soit conforme au droit international. 11. La CIJ invite la Commission arabe permanente des droits de l’homme à adopter une procédure de modification de la Charte rabe des droits de l’homme identique à la procédure retenue dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention relative aux droits des migrants. 81A, avenue de Châtelaine, P.O. Box 216, CH-1219, Châtelaine / Geneva, Switzerland Tel: +41(0) 22 979 3800 – Fax: +41(0) 22 979 3801 – Website: http://www.icj.org - E-mail: info@icj.org 17 / 17